En marge du « Delta Tour of Champions », le circuit organisé par l’ATP qui rassemble les anciennes gloires des 30 dernières années, l’ITF a mis sur pied un circuit seniors, regroupant des amateurs peu ou pas connus du tout. La motivation des joueurs y est toutefois au moins aussi importante et le niveau de jeu pratiqué y est plus que correct. Depuis le début de la saison, le Tournaisien Guillaume Giraud tente de s'y faire un nom. En quart de finale sur l'herbe synthétique © Guillaume Giraud Si le premier circuit est avant tout un spectacle donné dans des endroits prestigieux (comme le Royal Albert Hall pour le Masters) et où la qualité du jeu importe moins que le nom des joueurs en présence, le second se joue dans des clubs de province, face à quelques dizaines de spectateurs. Alors que le Delta Tour permet de revoir les McEnroe, Noah, Courier ou Wilander (entre autres), le senior Tour n’est joué que par des amateurs et quelques anciens pro que presque tout le monde a oublié. Ceux qui ont une très bonne mémoire se souviendront peut-être de la Sud-Africaine Fairbank-Nideffer, quart de finaliste à Wimbledon en 88 et 89 et deux fois vainqueur de Roland-Garros en double, du Péruvien Pablo Arraya (deux titres du circuit pro à son actif), du Canadien Sznajder (ancien Top 50) ou du Sud-Africain Visser, n° 1 mondial en double en 1990 et vainqueur de trois Grands-Chelems dans cette catégorie. Mais aucun de ces joueurs n’a jamais été une « star ». Les Belges sont peu présents sur ce circuit mais ils ont pris l’habitude de s’y faire remarquer. Citons par exemple Pierre Godfroid (n° 2 mondial chez les plus de 45 ans) et Klaartje Van Baarle, Top 10 en 40 ans et plus. Depuis le début de l’année, un nouveau joueur fait beaucoup parler de lui : Guillaume Giraud. Ce Tournaisien de 36 ans est tombé dans le tennis quand il était petit puisque sa mère, Anglaise, était une des meilleures juniores du Royaume-Uni à la fin des années 50. Il n’a pourtant jamais vraiment été poussé dans cette voie et a préféré suivre (et réussir) des études d’ingénieur avant de s’installer à son compte comme traducteur-interprète. « par respect pour mes parents, j'ai enterré mon rêve sous des couches d'argile en me disant que ce n'était vraiment pas une activité », reconnaît-il. « Mais je me rends compte que je n'ai fait que construire un barrage derrière lequel l'eau s'est accumulée pendant près de 25 ans et qui, maintenant qu'il s'est fissuré, se déverse avec une force qui me dépasse un peu ! » B-4/6 en 2 ans.Car effectivement, lorsque le démon du tennis le reprend, il ne le lâche plus. A 34 ans, il sort sa raquette du grenier et se lance à la conquête du circuit belge. A la fin de la première saison, il monte C15/4 puis, l’année suivante (2004), B-4/6. Une progression fulgurante très certainement inédite dans nos contrées. C’est que Guillaume est un vrai boulimique du tennis. Il joue toutes les semaines dans deux ou trois catégories, aussi bien en Belgique que dans le nord de la France (où il a également progressé de 7 classements en octobre dernier). L’année passée, il disputa 211 matchs et il en a déjà 133 au compteur de 2005. Le tout en poursuivant son activité professionnelle. « C'est grâce à une bonne hygiène de vie et à une alimentation saine et équilibrée », précise-t-il « Beaucoup de fruits et légumes frais, des céréales complètes, des légumineuses, des fruits secs, quelques oeufs et un peu de fromage chaque semaine, et ni viande ni poisson depuis près de 20 ans ! Sans oublier une abstinence totale d'alcool et le moins de médicaments possibles... Voilà mes secrets !!! » Avec une telle forme et encouragé par sa progression, il décida de tenter sa chance sur le Senior Tour avec une assez belle réussite puisqu‘à la faveur de trois quarts de finale, il se trouve déjà dans aux alentours de la 50e place mondiale. Le tout toujours à 100 kilomètres heure puisqu’il n’est pas rare qu’entre deux épreuves à l’autre bout de l’Europe, il revienne en Belgique le temps d’un tournoi national. Le club d'Alessio en Italie © Guillaume Giraud En plus d’assouvir enfin sa passion, Guillaume vit sur ce circuit une expérience vraiment enrichissante. Ce qui lui plaît le plus ? « Le dépaysement associé aux voyages, les rencontres avec les "autochtones" puisque j'essaie toujours de trouver des solutions d'hébergement chez l'habitant qui non seulement ne coûtent rien, mais me permettent de découvrir d'autres cultures, modes de vie, pensées, etc. Pendant les tournois, l'ambiance est aussi très conviviale, et je commence déjà à revoir des personnes que j'avais croisées ailleurs. » Roland-Garros et WimbledonBien sûr, tout n’est pas rose non plus. Arriver à combiner un programme de tournois intéressant avec ses contraintes professionnelles (même si son métier lui permet d’être souvent à l’étranger) et familiales n’est jamais facile. « La préparation de chaque tournoi prend un temps fou », précise-t-il. « Je dois d'abord chercher quel tournoi j'ai le droit de faire (tous n'ont pas la catégorie "35 ans"), puis voir si je peux y aller à un coût raisonnable (avion, train, bateau, voiture) et si je dois louer une voiture sur place, ensuite chercher une solution d'hébergement chez l'habitant, puis faire les démarches d'inscription, et enfin préparer ma valise et mon sac de tennis, et éventuellement ma nourriture maison. Heureusement, Internet existe, et cela me fait gagner un temps fou ! »
Ensuite parce que ses performances lui ont ouvert de vraies perspectives. Quelques articles ont été publiés à son sujet et il espère intéresser prochainement des sponsors même si le temps lui manque pour effectuer les démarches nécessaires. Côté classement, il ne compte pas s’arrêter là non plus puisqu’il aimerait atteindre le Top 5 d’ici deux ans. Un objectif qui peut paraître très ambitieux mais Guillaume ne cesse de le prouver depuis deux ans : tant qu’on prend du plaisir, rien n’est impossible. |